Sans assurance maladie, obligés de travailler pour subvenir à leur besoin, certaines personnes du troisième âge doivent aussi lutter contre les préjugés et soupçons de sorcellerie.
Tous les jours, sauf le dimanche, qu’il pleuve ou qu’il vante, Mamie Anne installe son petit comptoir de fortune en bordure de route. A plus de 70 ans, malgré une jambe malade qui l’oblige à se déplacer à l’aide d’une béquille, la septuagénaire s’adonne au petit commerce pour subvenir à ses besoins.
Elle vend du pain acheté directement à une boulangerie à quelques pas de son comptoir à Emana. Dans son panier qu’elle propose en particulier aux voyageurs se rendant à l’Ouest et les autres villes de la région du centre, on trouve du pain pour toutes les bourses. Celui de 125, de 200 et de 350 F Cfa. Mamie Anne propose aussi des avocats. Le matin avant d’installer son panier de pain et son plateau d’avocats, cette grand-mère a l’allure imposante se livre au commerce de l’eau. Pour cela, elle a installé un robinet dans la cour du domicile familiale où le voisinage peut se ravitailler en eau potable moyennant une certaine somme (15 F Cfa le seau de 10 litres par exemple).
L’argent qu’elle tire de ses différentes activités lui permet de subvenir à ses besoins. Ses enfants pour la plupart n’ont pas d’emploi stable. Alors de temps à autre, elle donne un coup de main pour les factures d’eau et l’électricité du domicile familiale, acheter les remèdes de sa jambe malade et payer son taxi pour assister au culte du dimanche, la seule sortie qu’elle s’autorise encore. Et même si elle refuse de l’avouer par pudeur, il y a des jours où Mamie Anne aimerais bien en finir avec ce rythme infernale et garder plus souvent le lit. Surtout quand ses rhumatismes se « réveillent ». En réalité mamie Anne fait partie de cette catégorie de personnes âgées obligées de travailler parce que sans pension retraite, ni revenus stables.
Si le Cameroun n’est pas encore confronté au vieillissement de sa population, des études du Bureau Central des recensements et des études de population (Bucrep) font état de ce que leur nombre ne cesse de croitre. Les chiffres parlent d’une proportion de 957 894 en 2010, pour atteindre 1 073 237 et 1 202 468 en 2015 et 2020. Ces études soulignent que la précarité économique touche aussi de plus en plus les personnes âgées des campagnes. Quant à leur accès aux soins de santé, Ils sont nombreux à ne pouvoir bénéficier des soins du service de gériatrie de l’hôpital central. Pour soigner sa jambe malade Mamie Anne a recours à l’indigène. « Même la ça ne va pas. En ville tout s’achète. Même l’aloe Vera que je mets sur ma jambe coûte de plus en plus chère pour moi », regrette la vielle dame.
Mais la précarité n’est pas le seul problème auquel sont confrontées les personnes âgées. Il y a aussi la discrimination. Le thème retenu pour cette de la journée internationale qui leur est dédiée édition portait d’ailleurs « Prendre position sur l’âgisme ».
En effet, plus elle avance dans l’âge, plus certaines personne âgées sont soupçonnées de sorcellerie et rejetées par leur entourage. Le reporter a vécu une scène édifiante à ce sujet.
Une vielle dame d’environ 78 ridée comme une pomme, au lent comme une tortue vêtu d’haillons demandait son chemin aux passants de Nlongkak. Maigre presque émaciée, des yeux plutôt globuleux, elle faisait effectivement peur. Personne pour lui indiquer son chemin malgré ses « mon fils, ma fille ! ». Il a fallu qu’un jeune homme indulgent pour que la vieille puisse avoir le renseignement tant recherché. « Très souvent quand une personne surtout une femme a atteint un certain âge on la soupçonne de sorcellerie. On oublie très vite que eux aussi ont été jeunes et ont eu une vie », s’insurge Djaili Amadou Amal qui a fait de cet épineux problème le thème principal de son roman. «Miistirijo : La mangeuse d’âme ». Il n’y a pas de limite à la sensibilisation
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