Yaoundé. Le chanvre indien, la cigarette, les
barbituriques et l’alcool sont les substances nocives les plus consommées.
Attention les
enfants danger ! La drogue est dans les cours de récréations de vos lycées
et collèges) à Yaoundé. Le 24 avril 2012, Agoumé, un élève inscrit en classe de
troisième au lycée bilingue d’Essos à Yaoundé, est interpellé par la police pour
possession et trafic de stupéfiants. Selon les responsables de l’établissement,
l’adolescent âgé de 17 ans, proposait du chanvre indien à ses petits camarades.
Dans une récente enquête parue dans Le Jour, Jules Nguimbous, surveillant
général en charge des classes de 4èmes au lycée d’Anguissa, confirme
que les élèves de cet établissement consomment du chanvre indien, du Tramadol (un
antidouleur dont l’usage a été détourné) dans une salle de classe abandonnée.
Selon le Comité
national de lutte contre la drogue (Cnld), les 15-25 ans représentent en effet
60% des consommateurs de la drogue. A
Yaoundé, les foyers de vente du chanvre indien, localement appelé
"banga", et de cocaïne, sont entre autres, la gare ferroviaire, les
quartiers Nlongkak, Briqueterie et Mokolo Elobi. Selon le Cnld, certains
lépreux aussi sont des "dealers" de drogue. 100 grammes de chanvre
indien, une quantité suffisante pour confectionner trois joints coûtent 100 F
Cfa.
Bic rouge
Des élèves dans un cours de récréation |
Chez la plupart
des élèves, la consommation de la drogue est occasionnelle. C’est surtout lors
des rassemblements, bals ou kermesses, que les initiations se font. L’habitude
est restée chez beaucoup d’adolescents. C’est le cas de Franck A. élève en 1ère
D au lycée Leclerc. Avec des amis, ils ont même créé un langage codé pour
parler d’alcool en toute tranquillité. L’expression « j’ai oublié mon Bic
rouge » est utilisée pour dire qu’ils ont oublié un sachet de whisky
à l’étiquette rouge. C’est avec l’argent de poche que lui donnent ses parents, que
Franck s’approvisionne en alcool. Il raconte que quand l’envie de boire est
très forte, il se rend derrière la classe pour « biberonner ». A la
fin des cours, certains élèves vont dans les bars qui jouxtent leurs écoles,
comme aux lycées de Nkol-Eton, de Tsinga, de Mballa 2, de Nkolndongo, etc, où
l’alcool leur est vendu librement, même quand ils arborent leur uniforme scolaire.
Règlement intérieur
Si la
consommation de la drogue touche les élèves issus de tous les milieux sociaux,
Madeleine Boanimbeck, la responsable du «Centre vie » de l’hôpital central,
qui apporte une aide psychologique aux toxicomanes, explique que le phénomène
est plus marqué chez les jeunes de familles modestes. «Certains vendent du
chanvre indien pour avoir de l’argent.
Or, on ne peut pas vendre ces substances sans les consommer »,
regrette Marie Boanimbeck. La plupart des consommateurs de drogues sont des
élèves du second cycle. Le phénomène concerne aussi bien les filles que les
garçons, avec toutefois une proportion plus élevée chez les garçons.
« Beaucoup d’élèves quand ils commencent à se droguer, sont très
indisciplinés et ont de mauvais résultats scolaires », observe Paul
Robert Nloh, surveillant de secteur des premières au lycée de Ngoa Ekellé.
Face à l’ampleur
du phénomène, des lycées ont pris plusieurs mesures. Des messages de sensibilisation
sont affichés dans les cours de récréation. Au lycée de Nkol-Eton on peut lire
« Le lycée de Nkol-Eton est un espace non fumeur ». Des fouilles
inopinées des sacs d’élèves ont régulièrement lieu. Les responsables de
l’établissement se réjouissent du fait que, depuis 3 ans, aucun élève n’a été
surpris avec une drogue. Le règlement intérieur, prévoit
aussi des sanctions disciplinaires que les dirigeants n’hésitent pas à
appliquer à la moindre incartade. «Tout élève surpris avec de la drogue est
définitivement renvoyé du lycée », prévient Paul Robert Nloh, surveillant
de secteur dans ledit lycée.
Elsa Kane
« Communiquer avec les parents »
Mireille Ndje Ndje. La psychologue
parle des raisons qui poussent les élèves à se droguer.
Qu’est-ce qui
peut pousser un adolescent à prendre de la drogue ?
L’adolescence est une période d’exploration et
d’expérimentation de soi-même et du monde extérieur. C’est aussi la période de
recherche de sa propre identité. Cette quête identitaire se manifeste parfois
par la prise de risques. L’un de ces
risques est le recours à la drogue. L’élève se drogue parfois sous
l’influence des mauvaises fréquentations, pour faire comme ses copains. Il y a en a qui veulent éprouver du plaisir, des émotions fortes ou
surmonter leur timidité, jouer aux « durs ». Il faut noter que le
quartier, le milieu familial, influencent aussi les jeunes. Si les parents
prennent de l’alcool, les enfants seront tentés d’en faire autant.
On reconnaît l’adolescent qui se drogue par son
comportement marginal. La prise des stupéfiants entraîne souvent un repli sur
soi-même : l’enfant fuit ses amis, sa famille, et ne participe plus aux
loisirs qui l’intéressaient avant. Le jeune drogué néglige aussi ses études et
son hygiène corporelle. Il a des accès de rire ou de pleurs, sans motif
apparent. Les enseignants et les parents doivent aussi être attentifs aux
odeurs sur les vêtements ou la chambre
de l’enfant. Et s’alarmer lorsque l’adolescent a une démarche ébrieuse, des
cicatrices le long des veines, des ecchymoses sur les mains, les bras ou les
jambes. Beaucoup de jeunes drogués sombrent dans le vol, la violence. Certains
deviennent des criminels.
Comment lutter
contre ce phénomène en milieu scolaire et, surtout, aider les toxicomanes?
Face à l’adolescent consommateur de drogue, il faut
éviter la dramatisation excessive qui peut le pousser à continuer à se droguer
par défi. Ne surtout pas le stigmatiser
et le présenter comme un déviant, alors qu'il essaye de s'affirmer et se
construire. En même temps, il ne faut pas banaliser, car le recours
à la drogue peut traduire un manque, une difficulté chez l’adolescent et chez
le groupe dans lequel il vit. Il faudrait rétablir communication avec les
parents et les enseignants, en les informant sur les difficultés psychologiques
de l’adolescent. Lorsque l’adolescent devient dépendant, il faudrait consulter.
Propos recueillis par E.K.
j'aime bien ton article il souligne ce problème qui de plus en plus mine la société camerounaise..Et pour avoir fréquenté le centre "la vie cet été" j'ai pu me rendre compte que les jeunes ont besoin d’être écoutés..j'ai assisté ma mère Madeleine Boanimbek dans certaines de ses "consultation" car je suis étudiant en fin de 2eme cycle en médecine au Maroc et je me suis rendu compte que une structure comme le centre "la vie" est sinon deviendra necessaire face à la progression des drogues chez la jeunesse camerounaise
RépondreSupprimerSeul bémol c'est MADELEINE BOANIMBEK sans le C..
Merci pour cet excellent commentaire. J’ai noté et je m’excuse pour l’erreur d’orthographe qui m’a échappé. Mme Boanimbek a été d’une aide précieuse par ses conseils et ses remarques avisés. Ce d’autant plus que les éducateurs refusent d’aborder un tel sujet. Pour beaucoup, c’est la drogue est un sujet tabou Pourtant il faut en parler pour une société sans stupéfiants.
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