Université
de Yaoundé 1. En trois ans les neuf cas qui ont été dénoncés
ne sont que la partie visible du phénomène.
Étudiante
en 3ème année à la faculté des Arts, Lettres et Sciences humaines
à l’université de Yaoundé, Ediwige M. dit avoir été victime de
harcèlement sexuel de la part d'un enseignant. « C'était en 2009,
je venais d’arriver de Kribi où j'ai obtenu un baccalauréat A4.
Le monsieur en question m'a demandé de « sortir » avec lui »,
raconte la jeune fille qui a pu lui échapper parce qu’il a, par la
suite, « mis l'œil sur une autre fille ».
A
la cellule d'écoute et de conseils du centre médico-social de
l'université, une source indique en effet que 9 témoignages
d'étudiantes victimes de harcèlement sexuel ont été recueillis
entre 2008 et 2010. « Il faut aussi tenir compte du fait que toutes
les victimes ne viennent pas nous voir », révèle notre source.
Conscient de cette situation, Jean-Emmanuel Pondi, le secrétaire
général de l’université de Yaoundé I, a rédigé un ouvrage
pour dénoncer le phénomène qui touche plus les étudiantes. La
cellule d'écoute et de conseils du centre médico-social reconnaît
aussi que le harcèlement sexuel existe entre étudiants. De même
que des étudiantes harcèlent des enseignants pour passer en classe
supérieure. Mais, des plaintes dans ce sens n’ont pas encore été
recueillies
Les
astuces des profs
Pour
arriver à leurs fins, certains enseignants usent de divers
subterfuges. « Tout commence souvent à la fin du cours. Il
t'appelle et te demande de le rencontrer dans son bureau. Une fois
là-bas, il te dit que tu es travailleuse mais hélas, tes notes ne
sont pas bonnes et qu'il va t'aider à t'améliorer à condition que
tu sois gentille avec lui. Quand tu dis non, il te menace », raconte
Edwige. Le refus de noter le travail de l'étudiante à sa juste
valeur est souvent alors utilisé en représailles par les
enseignants. Certaines filles se retrouvent parfois à reprendre
plusieurs fois la même unité de valeur. Au fil du temps, leur état
psychique s’en trouve affecté tout comme leur rendement
académique. « Souvent honteuses à cause de ce qui leur arrive, les
victimes se replient sur elles-mêmes», explique-t-on à la cellule
d'écoute et de conseils.
Dans
son livre « Harcèlement sexuel et déontologie en milieu
universitaire », Jean-Emmanuel Pondi rapporte le cas de deux
étudiantes : Josepha L. et Catherine M. L’une a dû changer de
filière et l’autre a quitté le pays pour échapper à leur
bourreau.
Pour
Jean-Emmanuel Pondi, le secrétaire général de l'université de
Yaoundé I, le harcèlement sexuel à l'égard des étudiantes est «
le déni de leur droits d'éducation comme être humain ». Il
s’explique par « la faiblesse du personnel enseignant, dans un
contexte où seuls 19% sont des femmes alors que paradoxalement les
étudiantes représentent plus de la moitié » des apprenants. Il
faut ajouter à cela la précarité financière de nombreux étudiants
et la démission de certains parents de leur responsabilité.
Mais
des solutions existent pour mettre fin au harcèlement sexuel. L'une
d’elles est la sensibilisation du public et la mise sur pied d'une
loi qui protège les femmes et les jeunes filles contre ce phénomène
qui n’est pas sanctionné par le Code pénal selon Jean-Emmanuel
Pondi.
Elsa Kane
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