Nancy Fawoh, blogueuse
Le 30 septembre, elle a reçu à Yaoundé, un prix spécial pour son action en faveur de la paix. C’était dans le cadre de l'édition 2022 des ABC Blogs Awards qui se sont tenus en marge du Colloque international des médias en ligne. Dans cet échange, elle revient sur ce qui a milité en faveur de son prix et son combat pour être à 28 ans seulement, à la tête d’un journal (Le Gidéon) et promouvoir la paix.
Bonjour Nancy, comment te sens-tu au lendemain du prix spécial que tu as reçu devant un parterre d’invités, notamment les membres du Comité scientifique du colloque Média 2022 ?
Je suis très heureuse d'avoir remporté ce prix spécial pour la promotion de la paix. C'est le couronnement d'un long travail et surtout d'un travail bien fait.
Tu as été primée pour ton action en faveur de la paix. Particulièrement contre les discours haineux en ligne. Dans un contexte où, on observe la montée de l’incivisme numérique, dis-moi comment tu utilises ton blog pour sensibiliser et susciter un changement de comportement ?
Le journaliste de paix, c'est un peu ma base. La prise de conscience est venue de la crise politique que nous vivons depuis 2016 dans le Nord-ouest et le Sud-ouest du pays. Cette situation a favorisé la montée d’un discours violent, tribaliste et des fake news. La toile n’était plus un espace de partage mais un autre terrain de guerre. Cela m’a perturbé. En tant que journaliste et blogueuse c'était important pour moi que les articles que j'écris, toute l'information que je traite soit un moyen de sensibiliser, montrer l'importance de la paix pour le devenir d’une nation. Comme un grand nombre de mes lecteurs est dans la zone anglophone, j'évite les discours de haine. Mes informations sont filtrées et bien traitées. Donc c'est un peu comme ça que j'utilise mon média.
Depuis combien de temps es-tu engagée contre les discours de haine ?
C’est un travail que j'effectue depuis 2020. En effet, j’ai travaillé au niveau de la télévision. Mais le cadre n’était pas assez épanouissant. Ça ne me donnait pas satisfaction en termes de ligne éditoriale et de la gestion salariale. Mon travail était parfois réécrit au point où, je ne reconnaissais plus la version que j'avais envoyée. Je me suis dit ok si c'est comme ça, c’est mieux de réaliser quelque chose où je peux mieux m’exprimer. Avec l'aide de mes amis, je me suis lancée dans la création d’un média.
Tu te retrouves à 28 ans seulement à la tête d’un journal Le Gideon. Ceci dans un contexte où la presse fait face à la paupérisation. Comment t’en sors-tu ?
J'ai lancé mon journal papier en 2019 et le site web en 2020. C'était pour moi une manière de vivre de mon travail car j’étais fatiguée de travailler sans salaire. Cela n’a pas été facile. Et c’est toujours difficile actuellement. Par exemple, les entreprises ne peuvent pas te donner la publicité s'ils ne te connaissent pas. Il faut faire ses preuves. C'était un gros challenge et j'ai utilisé le digital pour sortir la tête de l’eau. Je peux dire que les réseaux sociaux m'ont tellement aidé à vendre le journal parce qu’on avait les gens qui voyaient les images sur Facebook, sur WhatsApp. Donc le digital m'a aidé à construire ma visibilité. Et je me dis ok, il faut aussi l'utiliser (le digital) pour sensibiliser les populations.
Pour cette sensibilisation, tu étais engagée lors du Colloque international sur les médias en ligne fin septembre, tu as fait partie des panélistes d’une conférence sur l’usage du digital et des médias sociaux en temps de crise.
Oui, nous étions trois panélistes. Mélanie Ndefru, Caroline Mveng
et moi-même avons entretenu l’assistance sur le thème : « Digital et
social Média : Effective tools for storytelling in times for
crisis ». La modération était assurée par Laure Nganley de
#Defyhatenow, une organisation qui promeut la paix et lutte contre les discours
de haine. J’ai partagé mon expérience pour expliquer comment on utilise les
storytelling pour promouvoir la paix dans notre entourage. Surtout que
plusieurs d’entre nous viennent des régions en crise. Dans notre audience, plusieurs personnes ont vécu le drame des violences
dans leur chair.
Ce Colloque a abouti à l’élaboration d’une charte pour les bonnes pratiques en ligne en Afrique. Quel peut être l’impact de ce document sur l’incivisme en ligne au Cameroun?
Le colloque a été une bonne opportunité pour les créateurs de contenus pour partager leur expérience, se former et en savoir plus sur les bonnes pratiques en ligne. C’était une occasion d’acquérir plus de rigueur dans l’activité. Et dans notre environnement où les lois sur la communication digitale sont encore rares, la charte va permettre l’auto régulation de la blogosphère africaine. C'est tellement important. Tous les utilisateurs du web pourront l’utiliser comme un guide.
Merci Nancy pour cet
échange, avant de nous quitter, peux-tu présenter ton parcours avant Le
Gideon ?
J’ai étudié à l'université de Buea où j'animais une émission radio intitulée " Économiste perspective" et après ça, je pars à la télévision où je fais un an. J'avais un programme économique. J’étais beaucoup pour l’information économique. J'avais cette soif de passer les messages surtout en ce qui concerne l’économie de pays. C'était un peu ma motivation. |
Propos recueillis par Elsa Kane Njiale
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